“Bienvenue à Venise, mon amie.”

Ce fut les premiers mots que Sirius prononça à l’attention de Galatea Rigel. Cela faisait 9 ans que cette dernière l’accompagnait par mont et par vaux dans toute ses entreprises, faisant preuve d’une loyauté indéfectible ainsi que d’un courage à tout épreuve dans l’accomplissement de sa mission visant à protéger son jeune maître.

Sirius était reconnaissant à Galatea pour ses loyaux services. Mais il ne le serait jamais assez pour l’avoir extirpé de l’enfer qu’était sa solitude.

Même si les circonstances étranges de sa créations pourraient amener à penser que Galatéa était dépourvue de libre arbitre et créée dans le but de servir Sirius au doigt et à l'œil, il en est rien. Au contraire, l’homonculus qu’il a créé avec celle qu’il appelait la Sorcière Vautour était pourvu d’une forte volonté et d’un libre arbitre à tout épreuve. S’il avait mis la main à patte pour créer son enveloppe charnelle, il en était rien pour sa personnalité. Et c’était précisément ça qu’il respectait profondément chez Galatéa Rigel.

Elle est restée à ses côtés de son propre gré. Et en cela se trouvait le plus beau cadeau qu’elle pouvait lui faire.

Un air apaisé sur son visage, Sirius observait la magnifique vue que lui donnait le Pont Rialto. Malgré sa fierté de Florentin, il était difficile de trouver une ville plus belle que la Sérénissime. Même Galatéa semblait ébahi, un air radieux s’affichait sur son visage candide. Il pensait profiter un peu du temps libre qu’il lui restait avant d’enquêter sur les meurtres de Venise en se promenant avec son amie, comme deux personnes normales.
Parler de tout et de rien en mangeant une glace, voir Galatea paniquer sur un horoscope indiquant un Mercure Rétrograde en Balance, aider un charmant couple de touriste étrangers à prendre une photo… ce genre de choses.

Une journée banale au sein d’une vie banale quoi. La tranquilité.

“Je te laisse décider quel sera le programme aujourd’hui, Gala. Tu as carte blanche. Ne te soucis pas des dépenses, je m’en occuperais. C’est la première fois que tu viens à Venise non ? Donc dis moi ce que tu veux faire, nous allons y aller de suite.”

Ils avaient prévu de se rendre à la Basilique Saint Marc et à l’Institut Vendemion le lendemain afin de commencer à travailler. Mais aujourd’hui, la journée serait dédiée à la meilleure des amies, et personne n’empêchera ni lui ni elle de profiter de cette radieuse journée !

Venise.

L'eau qui la traverse semble dormir paisiblement, tendrement. Les vagues se montrent seulement par la présence de quelque poisson, mais surtout par les gondoles qui passe sous les ponts. 

C'est la première fois que je viens ici et pourtant, ce n'est pas vraiment très loin de chez nous quand on regarde le trajet pour s'y rendre en voiture. 

Malheureusement, la voiture n'est pas très utilisable en ville, la faute à la structure des lieux. Il fallait donc marcher pour voyager. Et aujourd'hui, je voyage avec Monsieur Sirius. C'est mon supérieur, mon maître qu'on pourrait définir si je restais sur la base qu'il est humain et moi non. Mais il me considère pas ainsi, plus maintenant, j'ai l'impression. Je ne suis plus vraiment son esclave et je le vois dans sa manière de se comporter, mais comment me perçoit-il précisément désormais ? 

Il me nomme comme son amie, me donnant un sourire apaisé, et cela me suffit. Du moment que les choses reste ainsi, moi, je pense que je pourrais vivre constamment ainsi.

Vivre. 

Combien de temps ? L'angoisse me fait transpirer rien que de me questionner sur cela. L'angoisse monte peu importe la question en fait, car une question, c'est de l'ignorance, un doute, une inconnue, c'est quelqu chose qui fait qu'on n'est pas sur de ce qui va arriver par la suite. 

Je stresse, mais c'est dans ma nature, ma personnalité, celle que je suis et que je resterais. Si je ne m'inquiète pas, qui le fera ? Monsieur Sirius ? Hors de question ! Et puis ce n'est pas dans sa nature. Il est assuré et fier, alors les questions, ce n'est pas pour lui. Ce qu'il cherche, ce sont les réponses.

L'enquête. 

C'est pour cela que nous sommes venues ici à la base. Résoudre les mystérieux meurtres qui perdurent actuellement en ville... Trouver les réponses et élucidé ce mystère. 

Cela n'aurait été que moi, je pense que j'aurais à tout prix évité la ville jusqu'à ce que le mystère soit élucidée, car ce n'est pas mon genre de courir après le danger, mais je ne peux pas laisser monsieur Sirius s'y rendre seul... Et je m'en serais voulu. Et il m'en aurait voulu peut-être, et j'aurais perdu toute sa confiance, et j'aurais peut-être même été abandonné à cause de mon inutilité.........

Je me perds facilement dans mes propres pensées, mais je préfère m'attendre au pire. Heureusement que Monsieur Sirius viendra donc me sortir de mes pensées pour me demander ce que MOI je voudrais faire. Une question à responsabilité, des choix, des doutes, mais surtout... Beaucoup d'argent. 

"Je... Je ne sais pas Monsieur. Je ne connais pas et je ne veux pas vous forcez à faire une activité qui pourrait vous déplaire."

Au même moment, mon regard est attiré par la gondole qui passe au même moment que j'explique mon hésitation. Le gondolier debout sur son petit bateau lève la tête et nous fait un signe de bonjour, conduisant agréablement sans montrer de grandes difficultés à la conduite. Cela ne doit pas être trop compliqué à conduire ce genre de chose. 

"Hum... Heu... J... Est-ce que j... Enfin ont... Je peux essayer de conduire une gondole ?"

Alors qu’elle bégayait sur le fait de ne pas vouloir forcer Sirius à faire une activité qu’il ne lui plairait pas, Sirius commença à soupirer. Pourquoi fallait-elle toujours qu’elle hésite et doute de ses propres choix ? Un soupir échappe au florentin. Qu’est-ce qu’il allait faire d’elle, se demanda-t-il avec humour. Puis, elle demanda avec son habituel ton hésitant, si elle pouvait conduire une gondole. Pourquoi pas. Après tout, il serait criminel de faire un séjour à Venise sans faire un tour dans ces fameuses embarcations qui peuplent les canaux de la Sérénissime.

“Bien sûr. Quoi que ça reste un peu compliqué, vu l’attachement des gondoliers à leur barque, mais je suis sûr que l’on pourra trouver un arrangement.”

Sirius se voulait rassurant. Il voulait que Galatea s’amuse tout son saoul aujourd’hui. De plus, il ne laisserait personne d’autre qu’elle être son chauffeur. C’est donc d’un pas décidé qu’ils descendirent du Pont en direction du canal le plus proche. Là, se tenait un gondolier qui venait tout juste de déposer des clients. Vêtu avec des couleurs vives, il fait penser à Sirius à Arlecchino, de par son air et apparence fantasque. Cependant, il pouvait entendre du haut du pont les acclamations des touristes qui ont vu en lui un guide excellent ainsi qu’un navigateur consciencieux du bien être de ses clients.

Sirius pensa que c’était le meilleur candidat pour réaliser le souhait de Galatea. C’est donc d’un pas décidé qu’il descendit du pont, en direction de l’étrange gondolier.

"Buongiorno, Signor. Mon amie et moi souhaitons faire un tour de gondole. Pendant deux heures environ. Et un détail supplémentaire, elle souhaiterait conduire l’embarcation en question. Est-ce possible ?”

L’extravagant gondolier se retourne de façon théâtrale vers le florentin. Une démarche exagérée, de grands mouvements de mains, il ne fait aucun doute que ce gondolier était un individu énergique.

“Salve Signor é Signora !”, commença t-il avec une révérence. “Vous souhaitez faire un tour de gondole en amoureux ? Bien entendu que cela est possible ! Venizia est la capitale mondiale, que dis-je, INTERGALACTIQUE de l’amouuuuuuur ! Quel gondoliere je serais si je m’interposais sur le noble chemin de la passion ! Oui Signor ! J’accepte votre requête ! Cela étant dit…”, un sourire malicieux se dessina sur son visage. “Puisque vous voulez piloter ma barque, il vous faudra payer un petit supplément, hihi”

Ma foi, c’était plus simple que prévu. Et à tout les coups son supplément n’est pas quelque chose que Sirius peux surement se payer. Après avoir payé le gondolier, il prit la rame et la tendit à son amie.

“Galatéa, montre nous à quel point tu gères ce navire.”

Voir son amie heureuse était l’une des plus grandes joies de sa vie.

Alors qu’elle manipulait cette gondole d’une main experte, Galatea, aux petites attentions de son maître, lui demandait comment se passait la traversée pour l’instant.

“Tout va bien, merci de t’en inquiéter. C’est toujours surprenant de voir à quel point n’importe quel véhicule semble t’obéir au doigt et à l’oeil quand tu le manœuvres. J’ai vraiment le meilleur des chauffeurs à ma disposition à ce que je vois.”

Étant une créature née artificiellement, ses connaissances et ses capacités pouvaient être choisi à l’avance, afin d’orienter l’homonculus vers un set de compétence où elle excellerait Cela étant dit, nul ne pouvait prévoir qu’elle aurait une prédisposition innée à conduire n’importe quel véhicule, qu’il soit motorisé ou non. Pour Sirius, c’est juste la preuve même de l' unicité de son amie. Elle, tout comme lui, était un individu exceptionnel.

Elle demanda ensuite pourquoi Sirius se focalisait tant sur l’épanouissement de Galatéa. Il commença à répondre, toujours lové tel un chat sur l’embarcation.

“Gala, tu n’as vu le jour qu'il y a tout juste neuf ans. Et tes expériences en tant qu’être humain sont encore très abstraites. Je veux que tu expériences plus. Je veux que tu découvres le monde dans lequel je vis. Que tu aimes le monde que je chéris. Que tu ressentes de la colère, de la joie, de la tristesse. Je veux juste te voir t’épanouir en tant qu’être humain, car c’est ça, vivre. Un épanouissement permanent qui doit mener à une élévation du corps et de l’esprit.”

A coté de lui se trouvait une bouteille de vin, qu’il avait acheté au préalable. Il se servit une bonne coupe, qu’il se mit à déguster en direction du soleil couchant.

“Ce vin est délicieux. Je ne m’attendais pas à ce que les vins de Vénétie puissent produire pareilles breuvages. ” Il pense qu’il va confier à Gala la tâche d’envoyer une caisse de vin à Florence pour sa famille. Autant leur faire aussi profiter pendant qu’il y est. Mais il n’allait pas l’embêter avec ça tout de suite. Il voulait que Gala s’amuse. Et fasse de nouvelles expériences.

Un moment de pause s’installa dans sa réflexion, qui se termina par une autre gorgée.

“C’est décidé, Gala ! Nous allons pique-niquer dans la lagune. Mais avant ça, faisons le tour des canaux. Nous allons acheter des ingrédients ici. Et par la même occasion, ça te fera visiter la ville. La premire étape, le centre ville ! On va aller chercher les meilleurs mets que la ville peux nous offrir, mon amie !”

N’est-ce pas la normal que je m’inquiète pour mon maitre ? Il n’y avait pas de réel raison de me remercier pour cela. Mais cela me fait plaisir. Même, je dirais que c’est agréable. Quand il me complimente sur mes qualités et compétence, je me sens utile.

Conduire est un plaisir pour moi, alors je n’ai jamais d’hésitation ou de soupir à jouer les chauffeurs pour monsieur Sirius.

"Je ne suis pas aussi compétente que cela Monsieur… Ce ne sont que des bases acquises avec l’expérience de mes précédentes conduites."

Est-ce que j’avais déjà conduit le moindre bateau avant ? Après, cela semble facile à première vue.

Ciel d’azur sans nuage, le temps est magnifique et vire doucement au crépuscule par le soleil qui glisse doucement vers Morphée. Le temps s’écoule lentement tandis que je rame calmement le long des ruelles de la ville. J’attendais simplement en regardant le ciel que Monsieur Sirius me réponde sur ce qui lui ferait plaisir de faire, voir ou découvrir.

La priorité de ses réponses fut différente. En fait, je ne m’attendais pas à ce qu’il parle de moi et mon épanouissement…

Ses mots sont agréables. Me donnant un étrange ressenti dans la poitrine. Voir le monde dans lequel il vit… Le chérir et ressentir les émotions… C’est quelque chose de très beau et agréable quand je l’entends prononcer cela. Mais il n’y avait qu’une seule chose qui… Comment… Comment puis-je dire que cela m’angoisse un peu…

Je n’ai que neuf ans… Mais j’en ai déjà neuf.

J’ai connaissance de ce que je suis. Et je suis heureuse que monsieur Sirius me juge humaine. Personne ne pourrait me faire un plus beau compliment je vous le jure.
Mais je suis un Homonculus. Et l’une des questions qui est capable d’emplir mon esprit est simple : Combien de temps il me reste ?

Nous homonculus, ne sommes pas éternelle. Nous vivons moins longtemps que les humains et parfois, nous sommes aussi plus fragiles qu’eux. Monsieur Sirius à fait un travail remarquable sur ma création, je ne peux en douter, mais je ne vivrais jamais aussi longtemps que lui. Mentalement, je me suis déjà adapté à cette évidence.

Mais depuis que ma relation avec mon maitre c’est améliorer, ce qui était peu de chose devient maintenant un compte à rebours auquel j’évite de penser.
Parce que comme vous le dites monsieur Sirius, Je suis épanoui aujourd’hui.

L’observant boire sa coupe de vin, lui qui affiche constamment sa confiance dans son visage, je l’observe quelques secondes très courtes avant de redresser la tête vers l’avant, un sourire serein.

" Vous savez choisir le vin monsieur, il ne pouvait qu’être agréable pour vous. Vous méritez aussi d’être pleinement épanoui !"

J’avoue que le vin, ce n’est pas vraiment mon truc. A la limite une coupe de champagne si je dois visé dans le luxe mais pas plus. Je suis plutôt simple au niveau des consommations.
Un instant de calme jusqu’à ce que Sirius reprenne une fois de plus la parole, il sembla d’un coup déterminé, excité par son idée qui venait d’apparaitre soudainement dans son esprit. Un pique-nique… Dans la lagune ? ça veut dire dans la gondole même ? Au milieu de l’eau ? C’est… Je… Waw…

O… Oui monsieur ! C’est une superbe idée ! Je, je vais naviguer jusqu’au centre-ville ! Et ensuite, on trouvera le meilleurs du meilleurs pour vous !"

Sans attendre, je vire vers un canal annexe de celui où nous nous trouvons pour partir en direction du centre-ville, montant tout de même un peu le rythme de la croisière car il ne faudrait pas nous plus que les magasins ferme à cause de l’heure.

Le ciel commence à assombrir ces couleurs et les magnifiques luminaires commence à illuminer les trottoirs. Après avoir naviguer, j’observe sur mon téléphone si nous sommes proche du centre-ville, correct !

Et toujours sans problème, je viens amarrer la gondole à quai pour que nous puissions allez faire quelque course, j’espère que la gondole ne risque rien si on la laisse ici le temps de faire quelque course.
Je sors la première, un peu surprise par le retour sur la terre ferme avant de tendre la main à Sirius, de manière courtoise, pour l’aide à remettre aussi le pied à terre.

" Au niveau du centre-ville, il y a une boulangerie encore ouverte pour nous procurer des baguettes et une fromagerie juste à côté avec des spécialité franco-italienne. Il faudrait regarder pour un peu de charcuterie et peut-être une nouvelle bouteille de vin si vous souhaitez gouter un autre cru italien. Il y a un magasin qui ne se trouve pas dans le centre-ville mais qui semble vendre parmi le meilleur du pays comme le Barbaresco Pio Cesare de 2017."

Je cherche à trouver via internet le meilleur pour monsieur Sirius, Jouant en même temps avec l’une de mes mèches de cheveux alors que je suis pleinement concentrée dans ma recherche sur mon téléphone.

“Commençons par le vin. Le fromage et la charcuterie passeront en dernier, j’aimerais conserver leur fraîcheur au maximum.”

S'ensuit ensuite une longue balade en gondole ou les rires et les taquineries fusent de bon train. Comme s’ils étaient des enfants. Pour Sirius, c’était un sentiment nouveau. A cause de ses dons et de son enfance en tant que mage héritier de la maison Rigel, la solitude a longtemps été son quotidien. Très rapidement, son orgueil a fait en sorte qu’il n’avait pas besoin de la compagnie des gens ordinaires, car elles ne méritaient pas sa présence.

Mais au fond, il savait à quel point il se mentait à lui-même.

Il avait faim d’amour, d’affection, de camaraderie.

Au point de profiter d’un projet d’étude pour créer celle qui l'accompagne depuis 9 ans.

9 ans…

C’était aussi durant cette période qu’elle avait fait la rencontre de celle qui deviendra la mère de Galatea.

La Sorcière n’était pas une personne que l’on voyait souvent. Sirius avait même de la chance d’être tombé sur elle. Elle n’était pas intimidée par son nom, par son prestige, par ses capacités ou son argent. Au contraire, elle ne semblait accorder d’importance à rien ni à personne, si ce n’était qu'elle-même.

Et il ne comprenait pas pourquoi elle avait décidé de l’aider.

Les souvenirs des différentes entrevues avec elle lui revenaient par flash.

Sa voix, railleuse et pleine de dédain.

Sa poigne, ferme comme un étau.

Sa respiration, pareille à un souffle de mort dans son oreille.

Jamais il n’a eu aussi peur d’un individu de sa vie. Il ne pouvait pas cacher éternellement son existence à son amie. C’était quand même sa “mère”. Mais il appréhendait quand même leur prochaine rencontre. Elle le lui avait promis. Mais il appréhende toujours. Après tout, qui aimerait se retrouver seul avec une sorcière ?

Il soupira longuement, puis regarda Galatea, en priant qu'elle ne pouvait pas voir sa mine inquiète. Cette dernière, pleine d’entrain et de conviction, était en train de remettre à sa place verbalement un vendeur qui voulait l’arnaquer, ayant surement pris la jeune majordome pour une touriste. La répartie, quoique hésitante, était claire et frappait juste. Il esquissa un sourire. Chaque jour qui passait, il devenait de plus en plus fier  de la personne que Galatéa devenait. La vérité sur sa mère pouvait attendre. Ce soir, ils allaient simplement se détendre.

Cette dernière revenait doucement sur la gondole, en chantonnant un petit air dont elle avait le secret. Il était rare de la voir un peu sur elle, confiante. Il souria et posa une main sur son épaule.

“Bon travail mon amie, maintenant dirigeons nous vers la lagune”

Ce soir, pas de sorcières, pas de meurtres, pas de mages et pas de problèmes.
Juste elle. Ce soir, il n’y aura que Galatea Rigel.

Le sens des choses.
Le sens des priorités... Le sens de la répartie... De la rhétorique...
Vous savez, comme je l'ai expliquer avant, cela fait maintenant plusieurs années que je suis proche de monsieur Sirius, et avec tout ce temps, je me suis souvent demandé pourquoi je n'ai toujours pas encore vue d'autres hommes comme lui.

Il est unique. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'autre comme lui. Est-ce parce que tous les hommes se doivent d'être différent les uns des autres ? Pourtant, nombreux sont ceux qui cherche à imiter ceux qu'on nomme célébrité.
Mais pourtant, personne n'a jamais tenté de lui ressembler.

C'est un homme d'ambition. Et moi, je ne cherche rien de plus que ce que je possède déjà.
Cela fait de nous deux personnes bien différentes. Mais...

J'observe son regarde perdu dans la plus profonde pensée de son esprit. Et quand je suis avec lui, mon horoscope se brouille, parce que je ne suis plus forcément moi-même, parce que je cherche à lui ressembler sans raison, sans que cela n'est rien à m'apporter. Ma voix tremble devant le vendeur auquel je tiens tête pour ne pas payer un prix déraisonnable comme si j'étais une étrangère, alors que je me serais sûrement rabaissé si j'avais été toute seule.

Je n'ai pas besoin des plus grands crus pour savourer une boisson ou un verre de grenadine bien trop mal dosé, mais avec lui, je veux goûter à ce que lui considère nommable comme millésime.

Et pourtant, je suis déjà satisfaite. Je veux juste aider monsieur Sirius, voir jusqu'ou ses envies vont. Voir ce que je peux réellement lui apporter de plus.

La gondole navigue sur l'eau calme de la ville, les regards parfois encore sont tourné vers nous, toujours l'intrigue des habitants de ne pas voir un gondolier conduire ce drakkar vénitien.

"Je pense que nous serons à l'aise ici au milieu de la lagune monsieur."

Au milieu de la lagune. Au milieu de tout. Comme un point central qui attire l'attention, l'attention du peuple. En tant que moi-même, l'idée me rend nerveuse et une petite goutte de sueur glisse jusqu'à ma joue.
En tant que majordome de Monsieur Sirius, il est de mon devoir de choisir la place qui mettra le plus en valeur ce dernier. Car, pourquoi ce cacher quand nous pouvons pique-niquer au milieu du monde?

L'eau est calme, dérivé ne devrait pas arriver et puis quand bien même il me sera possible de nous repositionner. Je pose enfin mes fesses sur le bois du bateau, gardant les yeux fixant les planche et le contenu des sacs de nourriture que nous avons acheter parce que... Je... Je ne veux pas regarder autour de moi et me sentir observer, non mais sérieusement pourquoi j'ai fais ça?

"B-Bon! Heu... Qu'est-ce que vous souhaitez comme sandwich monsieur...?"

Moi stressé ? Angoissé ?! C'est faux. Archi faux de chez faux... Bon d'accord, mais juste un tout petit peu.

"Monsieur, puis-je vous poser des questions ?"

Les moments où nous parlons directement sans voir le monde autour est rare. Et j'espère que mes questions ne seront pas prises à mal...

"Sachez d'abord que si j'ai fait quelque chose qui vous à troubler par rapport à votre regard inquiet de tout à l'heure, je vous demande de bien vouloir m'excuser et de ne pas hésiter à m'en faire part pour que l'erreur ne se reproduise plus... Et ensuite, j'aurais voulu savoir... Monsieur, quelles sont vos ambitions ?"

Les mots de Galatea résonnent dans l’esprit de Sirius. En effet, il s’en voulait de garder une information aussi importante. Aucun enfant ne devrait avoir à ignorer l’identité de ses deux parents, selon lui. Cependant, elle était une homonculus, les règles de l’humanité ne s'appliquent pas pour elle, même si Sirius la considérait comme une humaine.

“Ce n’est rien de très grave pour l’instant, mon amie. Je promets qu’un jour je t’en parlerai. Mais ce n’est pas le moment. Tu n’es pas encore prête.”

Quand est-ce qu’elle sera prête pour connaître sa mère ? Sirius ne voulait pas répondre à cette question.

Cependant, ce qui le troubla le plus était la partie sur ses ambitions.

Elle était une Rigel.

Tout le monde à la Tour sait quel est l’objectif des Rigel.

Lorsqu'ils ont rejoint l’Association il y a de cela 500 ans, ce même objectif a été vu comme étant une source de moquerie dans un monde où l'Église était toute puissante en Italie et où son influence s’étendait aux quatre coins de l’Europe.

Mais ils ont persisté.

Au fur et à mesure de leur ascension, marquée sous le signe de l’or, de la sueur et du sang, les rivaux d’hier sont devenus les clients d’aujourd’hui. Malgré leur statut de roturier, leur fortune grandissante faisait qu’ils étaient approché par nombres de familles nobles qui désirent en profiter.

Et de la fange, ils ont réussi à s’extirper.


En appartenant à la noblesse, les moqueries envers l’ambition des Rigel commencèrent à cesser, car ils avaient enfin les moyens de leur ambition, et une réponse radicale aux humiliations et aux provocations. Mais ce n’était toujours pas assez. Ils n’ont jamais désiré être au sommet de la montagne. Ce n’était pas suffisant. Ils désiraient se tenir au-dessus de la montagne, haut dans le ciel.
Ils voulaient surplomber chacun des nuages, briller dans cette toile céruléenne pour l’éternité.

“Mon ambition est celle de ma famille. Je souhaite devenir un Dieu.”

Ni plus. Ni moins. La Racine ne l'intéressait pas. Pour sa famille, la Vérité se trouvait dans le divin. Seul un être éternel peut prétendre y accéder.

“Ce monde est corrompu. Malade. Des guerres le ravagent depuis la nuit des temps, car les hommes sont incapable de faire fi de leur différence et de se comprendre. Couleur de peau, religion, statut social… Cela leur importe plus que le progrès et les avancés qu’ils pourraient faire en coopérant ensemble.”

“Ce monde se meurt. L’humanité ne faisait qu’un avec la nature. Aujourd’hui, elle se développe comme un cancer, saignant les ressources de la planète à blanc, comme quand on presse une olive pour y extraire de l’huile. Cela affecte aussi bien le monde des mages que celui des humains. La disparition de la nature au profit de la civilisation humaine affecte aussi la disparition du Mystère, car cette dernière aura toujours plus de ressources pour développer sa technologie.”

“Ce monde ne fonctionne pas comme il devrait. Il n’est que chaos et désordre. Violence et destruction. Quelqu’un doit intervenir pour y instaurer une ère d’harmonie et de paix. La ou les hommes feront à nouveau qu’un avec la nature. La ou les hommes pourront enfin se comprendre. Et pour ça, il me faut bien plus de pouvoir. Bien plus que ce qu’un Magicien pourrait détenir.”

“Je veux être un Dieu pour forcer cette utopie. Un miracle si brut et violent qu’elle mettra fin à toutes les différences superficielles qui gangrènent l’humanité. Une harmonie si coercive qu’il ne sera pas possible de vivre autrement.”

Il regarda Galatea droit dans les yeux.

“Je veux être un Dieu afin de changer le monde, Galatea. Tel est mon ambition.”

Un moment de silence s’installa entre les deux.

“Trouves-tu mon souhait trop ambitieux ? Me trouves-tu tu trop gourmand, ou orgueilleux de par le fait que je souhaite changer le monde moi-même ? Penses-tu vraiment que j’ai une chance de réaliser ce rêve ? Réponds-moi franchement.”

Ah ! Il avait oublié quelque chose !

“Oh et je souhaiterais un simple sandwich italien s’il te plait."

Changer le monde. Devenir Dieu. Une utopie.
Dans un moment pareil, ces mots ne sont que gourmandise somptueuse qui ne demande qu'à être dévorée. Dieu... L'ambition de toute une famille concentrée en un seul homme. Monsieur Sirius me surprendra toujours, encore et encore. Sincèrement, est-ce juste réellement possible une telle chose ? Je veux dire... Qu'est-ce que Dieu si ce n'est la définition de l'être suprême ? Et que puis-je faire pour le suivre jusque-là?

Il est mon créateur, celui qui est le résultant de ma personne. N'est-ce pas déjà une preuve de la supériorité de cet homme ? Je ne connais pas plus incroyable que lui, plus admirable et plus proche de l'être qu'il désire devenir. Encore une fois, je suis sa création, celle qui a réalisé dans le creux de ses mains par ses capacités et sa maîtrise de nombreuses formes de science et de magie.

Un sourire de bonheur lui ai adressé, pas de rire ou de doute, juste sincérité.

"Je suis persuadé que vous arriverez à devenir ce que vous souhaitez monsieur, je ferais tout pour vous soutenir ! Pour moi, votre ambition est votre plus grande qualité, car elle est pleinement différente de moi qui suis heureuse de ce que je possède sans chercher plus loin. Ces défauts qui sont luxure, orgueil ou gourmandise, il sont pour moi une preuve de votre conviction, que vous croyez en vous et vos capacités, votre héritage. Alors, non, je ne vous trouve pas trop ambitieux."

Pour être franche, je suis même surprise que la famille Rigel possède un but final. Intérieurement, je pensais qu'il n'avait pas d'objectif... Ou plutôt, que l'ambition était infinie et donc encore bien plus supérieur que Dieu.
En quelque sorte, je fais partie de son ambition, et je souhaite en être une partie importante, mais pourrais-je le rester longtemps ? Je veux dire... Combien de temps cela pourrais lui prendre ? Est-ce que je serais encore là pour lui ? J'aimerais tellement. Ma main caresse la gondole de bois pour me porter chance...

Dans le pain, jambon, parmesan, roquette et poivre se mélange pour former la demande de Sirius. Simple et peu surprenant de sa part, je me demande intérieurement si les dieux mange aussi des sandwich à l'italienne?

La nuit tombe doucement alors que le repas se poursuit par le bruit de la foule nocturne le long des routes piétonnes. Les pointes légères et faibles de lumière se déclarent alors présentes dans le ciel. Quelle belle nuit étoilée...

"Monsieur Sirius, je souhaite encore vous remercier pour tout... Si je ne me sens pas capable de partager une ambition aussi importante que la vôtre, sachez que pour moi, rester le plus longtemps à vos côtés est ce qui se rapproche le plus de mon ambition."

Mais hélas...


Je me réveille. Comme entré dans un sombre cauchemar. La pénombre dans la chambre d'hôtel... Ma couverture à moitié sur le lit et l'autre sur le sol, l'oreiller dans mes bras. Sommeil agité cette nuit encore...
Depuis deux semaines, rituel habituel qui est celui de frapper à la porte de la chambre de monsieur Sirius avant d'ouvrir lentement la porte.
Chaque matin, l'espoir de me réveiller de ce cauchemar. Chaque matin, il n'y a personne.
Le regard abattu...
Les larmes qui montent sans s'écouler, sans savoir où il pouvait bien se trouver.

J'ouvre les stores de sa chambre, ouvre et aère son lit, passe un léger coup sur ses tenues pour qu'il puisse les retrouver en parfait état à son retour, sans la moindre poussière. Je profite de l'instant pour m'occuper de moi un instant dans la salle de bain, attachant mes cheveux et me débarbouillant le visage avant de me fixer dans la glace...

"Mais où êtes vous donc... Monsieur Sirius...?"